Contraceptions,  Santé féminine

En finir avec la contraception hormonale

La norme contraceptive

La norme contraceptive, c’est le fait d’associer une contraception en fonction du statut et de l’âge de l’individu. Elle se caractérise par : 

  • l’usage du préservatif lors de l’entrée dans la vie sexuelle
  • la prise de la pilule lorsque les jeunes femmes entrent en relation stable, ou qu’elles connaissent des problématiques de cycle menstruel (douleurs, irrégularités…)
  • le passage au DIU (dispositif intra utérin), bien souvent hormonal, après avoir eu un enfant et jusqu’à la ménopause

La pilule “automatique”

Selon le rapport de Yaëlle Amsellem-Mainguy sur les jeunes femmes et la contraception, la plupart des jeunes femmes voient la pilule comme un passage obligatoire dans leur vie de femme, quand bien même elle paraît contraignante pour beaucoup, et qu’un oubli arrive souvent. On voit nos mères, nos sœurs, nos amies la prendre, on a donc tendance à reproduire ce schéma, sans se poser de questions sur les alternatives.

Les alternatives d’ailleurs ne sont pas forcément mises en avant par les professionnels de santé, ce qui contribue à renforcer l’idée de la pilule comme unique contraception efficace.

La pilule, contraceptive, mais pas que !

De nombreuses jeunes filles ont commencé la pilule non par pour se protéger d’une grossesse, mais pour des symptômes dûs à la puberté comme l’acné et les irrégularités du cycle. Les premiers cycles suivant la ménarche (premières règles) sont majoritairement irréguliers et anovulatoires chez la jeune fille à cause de l’immaturité de l’axe gonadotrope. On peut avoir cette irrégularité de cycle jusqu’à 2 ans avant d’avoir un cycle menstruel mature. Pas de quoi s’inquiéter en théorie donc.

Beaucoup de femmes atteintes de pathologies hormonales, comme l’endométriose, le SOPK, ou même une dysménorrhée primaire (douleurs sans aucun trouble), se voient prescrire la pilule comme unique moyen d’enrayer leurs douleurs. On sait aujourd’hui que ça ne “combat” pas la maladie mais cache les symptômes en mettant au repos le cycle menstruel.

La plupart des femmes sous pilule ne savent alors pas qu’elles n’ont plus de règles, mais des saignements de privation (à cause de la pause d’une semaine), et pourront croire à tort que leur cycle est devenu régulier.

Effets secondaires et début du déclin des contraceptions hormonales

Depuis 2013, on assiste à un déclin progressif de la pilule, suite aux scandales des pilules de troisième et quatrième génération. Alors que 40,8 % des femmes prenaient la pilule (45 % en combinaison du préservatif) en 2010, elles ne sont plus que 33,2%  (36,5 % avec le préservatif) en 2016.

Aujourd’hui, de plus en plus de femmes s’informent sur les effets secondaires potentiels de leur pilule, et souhaitent arrêter leur contraception hormonale.  Ce cheminement peut venir aussi d’une conscience écologique, ou une envie de partager la contraception au sein du couple.

Selon le sondage de Sabrina Debusquat, qui a réuni 3 616 réponses de femmes francophones âgées de 13 à plus de 50 ans, les effets secondaires au quotidien seraient : baisse de la libido : 70%; prise de poids : 54%; troubles de l’humeur : 52%; migraines : 36%; sécheresse vaginale : 34%; douleurs mammaires : 29%; acné : 21%; mycoses à répétition : 20%; mais aussi moins bonne circulation sanguine, spotting, cystites, perte de cheveux, nausées, sécheresse de la peau, inconfort digestif…  

Ces effets secondaires peuvent ne pas se remarquer car ils apparaissent progressivement au fur et à mesure des années, ou parce que les femmes prennent la pilule très tôt. En réalité, on réalise à quel point la pilule nous affecte le jour où on l’arrête.

On sait aussi aujourd’hui qu’elle augmente les risques d’AVC, de cancers, d’insulino-résistance, de dérèglement de la thyroïde ou encore de la flore intestinale.

Les étapes pour en finir avec la contraception hormonale 

Première étape : se renseigner sur les alternatives 

Il existe aujourd’hui plus d’une dizaine de contraceptions, notamment plusieurs non hormonales et efficaces (voir chapitre suivant), féminines ou masculines. Il n’y a pas de contraception “parfaite” qui conviendra à tout le monde. Chacun et chacune doit considérer les pour et les contre de chaque méthode, avant de voir ce qui lui convient personnellement à ce moment précis de sa vie.

N’oublions pas que la contraception c’est aussi une affaire de couple, impliquer son partenaire, le sensibiliser sur les effets secondaires, et décider avec lui du choix d’une autre méthode me paraît personnellement important pour assurer la réussite de ce changement.

Deuxième étape : échanger avec son professionnel de santé

Et c’est là, malheureusement, que le parcours se complique ! Sans vouloir faire de généralités, on entend souvent des témoignages de femmes s’étant pris des remarques désobligeantes en abordant un arrêt des hormones auprès de leur médecin ou gynécologue. On parle même de violences médicales dans certains cas.  On voit beaucoup de professionnels qui infantilisent les femmes et ne leur laissent pas le choix. 

Un professionnel de santé compétent se doit de communiquer sur vos alternatives, et d’accepter votre choix, même s’il juge que ce n’est pas “le bon” pour lui. N’hésitez surtout pas à aller voir un autre professionnel de santé dans ce cas.
Bon à savoir : les sages-femmes sont aussi habilitées à prescrire des contraceptifs et à vous suivre. Elles sont souvent plus attentives aux besoins des patientes (durée de consultation plus longue qu’avec un ou une gynécologue).

Troisième étape : se préparer au retour de son cycle, et aux effets secondaires potentiels 

Quand on décide d’arrêter la pilule, un des premiers réflexes consiste à recueillir des témoignages autour de soi, et on s’aperçoit que beaucoup ont souffert d’effets secondaires : aménorrhée, acné, perte de cheveux, hirsutisme, douleurs au ventre ou à la poitrine… Il y a une véritable peur de l’arrêt, chez des femmes qui n’ont jamais connu leur corps sans hormones, et qui ne savent pas à quoi s’attendre. Chaque femme va vivre son arrêt différement : selon sa pilule, son terrain, ses habitudes, etc.
Bonne nouvelle : on peut se prémunir au maximum des effets secondaires, en mettant en place une hygiène de vie appropriée avant son arrêt. Adopter une alimentation équilibrée et suffisante, prendre soin de son foie et de son système digestif, pratiquer une activité physique douce, éviter les perturbateurs endocriniens, et surtout faire preuve de patience… Les hormones ingérées pendant plusieurs années bouleversent votre fonctionnement naturel qui peine à revenir parfois. La naturopathie peut vous aider à rétablir cet équilibre, en agissant en amont de votre arrêt ou après.

Enfin, si comme beaucoup vous ne savez plus ce qu’est un cycle menstruel naturel, c’est le moment de se renseigner, et d’apprendre à détecter les signaux de son corps (glaire, température, col). Ca pourra être très utile en cas de dérèglement (SOPK post pilule).
Voici le schéma d’un cycle menstruel naturel “classique”, avec ses évolutions hormonales, de température, de glaire et de position du col. L’ovulation au J14 et le cycle de 28 jours sont des moyennes à prendre avec des pincettes. Un cycle dit normal peut varier de 25 à 35 jours, avec une phase lutéale entre 10 à 15 jours.

Quid du sevrage progressif ?

Le sevrage progressif, consiste à diminuer progressivement la dose de la pilule. Vous aurez besoin de couper vos comprimés et de les mettre sous gélule, puis d’échelonner ceux-ci sur plusieurs semaines ou mois (pilule entière, puis 3/4 , puis ½, puis ¼… jusqu’à l’arrêt). Le sevrage progressif pourrait donner moins d’effets secondaires d’après certaines personnes qui avaient eu un arrêt qui s’était mal passé. Malheureusement on manque de données pour savoir si l’arrêt progressif diminue réellement les effets secondaires. Vous pouvez tester si cela vous fait moins peur qu’un arrêt brutal, mais sachez que vous pouvez aussi arrêter la pilule brutalement, et que tout se passe bien !

Les contraceptions non hormonales fiables

Rappel

Aucune contraception (même hormonale) n’est efficace à 100%, et aucune contraception n’est garantie sans contraintes. On distingue 2 chiffres concernant l’efficacité : le chiffre “théorique”, quand tout se passe bien, et le chiffre “pratique” qui prend en compte la réalité du terrain (oublis, accidents en tout genre). Par exemple, pour la pilule, en utilisation parfaite, il y aurait 0,3% d’échec, et en utilisation régulière pour 100 femmes, on passe à 7%.Vous trouverez ici les chiffres, ainsi que les avantages et inconvénients les plus connus de chaque méthode non hormonale, pour femme mais aussi pour homme.

DIU cuivre

Mode d’action : le DIU cuivre, comme le DIU hormonal se place à l’intérieur de l’utérus par votre professionnel de santé, pour plusieurs années. Le cuivre endommage les spermatozoïdes et les empêche de rencontrer l’ovule. Il provoque également une réaction inflammatoire dans l’utérus, rendant impossible la nidation. 

Efficacité : en utilisation correcte 0,3% d’échec, en pratique 0,8%.

Avantages : contraceptif long terme, entre 5 à 10 ans, pas besoin d’y penser au quotidien. Il peut également s’utiliser comme contraceptif d’urgence posé dans les 5 jours après le rapport à risque. Remboursé par la sécurité sociale à 65%.

Inconvénients : pose douloureuse. Des règles souvent plus abondantes, plus douloureuses et plus longues, due à l’inflammation (pour certaines femmes). Risque d’expulsion avec les cups menstruelles. Peut aggraver les mycoses et perturber la flore vaginale et intestinale. Peut ne peut pas être supporté par certaines femmes (notamment celles aux utérus rétro-versés).

Préservatif masculin (moyen barrière n°1)

Mode d’action : méthode barrière la plus courante, qui empêche les spermatozoïdes et l’ovocyte de se rencontrer. Doit s’utiliser avec du lubrifiant, dès le début du rapport, et être déroulé précautionneusement pour ne pas réduire son efficacité (attention aux ongles et dents). Habituellement en latex, il en existe dans d’autres matières pour les allergiques, ou pour plus de confort.

Efficacité : en utilisation correcte 2% d’échec, en pratique 13%.

Avantages : seul contraceptif aussi valable contre les IST. Simple d’utilisation.

Inconvénients : le préservatif peut diminuer la sensation de vos rapports (selon les marques). Actuellement deux marques sont remboursées par la sécurité sociale, autres marques ou lubrifiants à votre charge.

Diaphragme (moyen barrière n°2)

Mode d’action : Le diaphragme (en latex ou en silicone) se glisse dans le vagin, au contact du col de l’utérus, pour empêcher le passage des spermatozoïdes vers l’intérieur de l’utérus. Il se pose au moment du rapport ou jusqu’à 2 heures avant, et doit être retiré 8h après le rapport. Il s’utilise obligatoirement avec un spermicide (crème ou gel).

Efficacité : en utilisation correcte 6% d’échec, en pratique 12%.

Avantages : se réutilise donc écologique. Plus de sensations par rapport au préservatif.

Inconvénients : une efficacité légèrement moindre par rapport au préservatif. Demande d’être à l’aise avec son corps pour la manipulation, et de bien prendre en compte les horaires à respecter. Il est prescrit sur ordonnance et est peu remboursé par la sécurité sociale. Spermicide à votre charge également.

Symptothermie (méthode naturelle la plus efficace)

Mode d’action : La symptothermie n’est pas une contraception en soi, mais une méthode de suivi de son cycle menstruel, qui se pratique dans un but de conception, de contraception, ou d’observation. Elle comprend l’analyse en temps réel des signaux de son corps (pertes, température, col), pour en déduire l’ouverture et la fermeture de sa phase fertile. 

Efficacité : en utilisation correcte <1% d’échec, en pratique 2%. Ces chiffres sont valables lorsque l’on évite les pénétrations en phase fertile. Si vous utilisez une méthode barrière à ce moment, c’est le chiffre de celle-ci qui s’applique.

Avantages : aucune contraception à utiliser hors période fertile, donc pas d’effets secondaires ni de manipulation à effectuer lors d’un rapport. Une meilleure connaissance de son cycle et de son corps. 

Inconvénients : il faut passer par une phase d’apprentissage de la méthode en utilisant une autre méthode non hormonale avant de se lancer. Cela peut se faire en autonomie (grâce au manuel), ou avec une conseillère (entièrement à votre charge). La méthode nécessite de l’observation, et il faut se procurer un thermomètre à double décimale (une dizaine d’euros environ).

Vasectomie (stérilisation masculine)

Mode d’action : intervention pratiquée par un urologue en 15 minutes sous anesthésie locale. Elle consiste à couper et bloquer les canaux déférents qui transportent les spermatozoïdes à partir des testicules. Il faut cependant environ 3 mois pour que l’homme n’ait plus de spermatozoïdes actifs. Un spermogramme est nécessaire avant l’arrêt d’une autre méthode contraceptive.

Efficacité : en utilisation correcte 0,1% d’échec, en pratique 0,15%. 

Avantages : pas d’effets secondaires (éjaculation, désir, érection identiques) hormis les risques liées à l’opération. Plus simple et moins onéreuse que la stérilisation féminine. Remboursée quasi intégralement. Elle devrait être préférée à sa version féminine.

Inconvénients : contraception permanente et non réversible, uniquement pour les personnes sûres de ne pas/plus vouloir d’enfants. Un délai de 4 mois de réflexion vous est demandé. Chaque opération chirurgicale comporte un risque (infection, etc).

Ligature des trompes (stérilisation féminine)

Mode d’action : opération effectuée sous anesthésie générale qui peut nécessiter quelques jours d’hospitalisation. Elle consiste à rendre les trompes imperméables et à empêcher ainsi la rencontre des gamètes (ovocyte et spermatozoïdes). Elle peut se faire par voie abdominale, par cœlioscopie ou par voie vaginale.

Efficacité : en utilisation correcte 0,5% d’échec, en pratique 0,5%. 

Avantages : effet contraceptif immédiat. Pas d’effets secondaires sur son cycle, sa libido, etc. Intervention totalement prise en charge par la sécurité sociale.

Inconvénients : contraception permanente et difficilement réversible, uniquement pour les personnes sûres de ne pas/plus vouloir d’enfants. Un délai de 4 mois de réflexion vous est demandé. Douleurs abdominales possibles, en plus des risques liés à l’opération.

Méthode testiculaire thermique (slip chauffant, andro-switch)

Mode d’action : La méthode thermique consiste à augmenter légèrement la température des testicules grâce à la chaleur corporelle à l’aide d’un sous-vêtement adapté ou d’un anneau à travers lequel on passe la verge et le scrotum. Les testicules plaqués contre le corps, la température s’élève, et la production de spermatozoïdes chute.

Efficacité : cette méthode n’a pas encore été approuvée par l’OMS ou par Santé publique France, mais plusieurs études encourageantes ont été faites notamment par le Dr Mieusset. Sur 51 couples et 536 cycles, 1 grossesse consécutive à une mauvaise utilisation du produit. 

Avantages : pas d’effets secondaires sur la vie sexuelle (taux hormonaux, libido, volume et aspect du sperme non modifiés). Réversible en quelques mois.

Inconvénients : habitude à prendre en termes de confort. Il doit être porté 15h par jour. Nécessite de faire des spermogrammes avant le port, puis régulièrement pour vérifier l’efficacité. D’après les tests, légère diminution du volume testiculaire. Achat du produit entièrement à votre charge.

Autres méthodes naturelles
Dans les méthodes naturelles, il y a tout d’abord le retrait, qui n’est pas conseillé car il y a un fort taux d’échec (4% en théorie, 20% en pratique). En effet, l’éjaculation est difficilement contrôlable, et la fécondation peut aussi se faire dès le début du rapport (spermatozoïdes dans le liquide préséminal).
En plus de la symptothermie, il existe d’autres méthodes de suivi du cycle, qui reposent sur moins d’indices : méthode des températures et méthode Billings (observation de la glaire). 

On entend aussi régulièrement parler de la méthode Ogino ou méthode du calendrier, moins fiable car elle se base sur les statistiques et le calcul en amont de ses jours fertiles. Il faudrait avoir un cycle très régulier et absolument aucune perturbation pour que cette méthode soit fiable (donc peu probable).

Enfin, il existe une dernière méthode naturelle réservée aux jeunes mères : la méthode MAMA ou aménorrhée lactationnelle, plutôt fiable (2% d’échec en pratique), mais utilisable seulement les 6 mois post-partum. 

Autres méthodes barrières
Il existe un équivalent féminin du préservatif masculin. Son prix est plus cher et son efficacité moins importante (5% en théorie, 21% en pratique).

Enfin, il y a la cape cervicale, qui fonctionne de la même manière que le diaphragme, mais avec une efficacité moins importante (16% en pratique, et 32% pour les femmes ayant déjà eu un enfant).

Sources
La page de l’OMS dédiée aux contraceptions
Le site “choisirsacontraception.fr” par Santé Publique France