Arrêter de porter des soutien-gorges : pourquoi et comment ?
Impossible de passer à côté de cette tendance : le No bra (sans soutien gorge en français) ou Free boobs (seins libres) devient de plus en plus courant, malgré les parades du secteur de la lingerie pour nous inciter à continuer à acheter…
Le jugement de la société
Beaucoup de femmes aujourd’hui ont fait du soutien-gorge un réflexe pour sortir en public, alors que la plupart s’accordent aussi à dire que c’est un soulagement de l’enlever chez soi… Alors pourquoi cette schizophrénie ?
Malgré mai 68 et la révolution sexuelle, et bien loin de faire changer la société, les femmes aux seins libres sont malheureusement minoritaires aujourd’hui.
Depuis les années 2000, le canon de beauté ce sont des gros seins ronds, fermes, et remontés au maximum, avec les tétons masqués. Push-up, armatures, baleines, coussinets… Autant d’accessoires pour masquer la réelle forme de notre poitrine et la rendre plus attirante. On comprends vite qu’un sein rond, enveloppé est plus esthétique aux yeux de la société qu’un sein qui pointe, en forme de poire. Tout cela est bien évidemment une histoire de conditionnement, comme de se sentir plus belle maquillée. On va avoir tendance, à force d’être confrontée aux images de seins ronds et parfaits des magazines, à se sentir “moche” avec notre poitrine naturelle.
La société tend à la sexualisation de cette partie du corps, qui doit à tout prix être sexy, sans être vulgaire (le paradoxe). On doit alors mettre en valeur mais sans montrer. Les jeunes mamans ont aussi pu se rendre compte que leur poitrine, avant la fonction nourricière, est avant tout un objet de fantasme masculin qu’il ne faudrait pas dévoiler en public (vous n’avez évidemment pas à vous cacher ou à vous sentir honteuse pour un acte aussi naturel que l’allaitement).
Une femme à la poitrine libre deviendrait alors provocatrice, aguicheuse, vulgaire, à la recherche du regard des hommes.
On apprends alors à porter des soutien-gorges dès le début de notre poitrine naissante, pour éviter les remarques et les regards. Arrêter le soutien-gorge c’est donc lutter malgré nous contre cette construction sociale “seins apparents = sal*pe”.
L’argument physiologique qui ne tient pas debout
On apprends dès l’adolescence que le soutien-gorge c’est pour notre bien, pour éviter que notre poitrine tombe et s’affaisse. Ah bon ? Vraiment ?
Aucune preuve scientifique du port de soutien-gorge contre le relâchement de la poitrine
Il n’a jamais été prouvé scientifiquement que les soutiens-gorge avaient une quelconque efficacité sur le maintien de la poitrine.
Porter un soutien-gorge en prévention d’un affaissement de la poitrine serait même contre-productif : la poitrine est composée de ce qu’on appelle « les ligaments de Cooper », des ligaments qui conservent les seins dans une sorte de « filet suspenseur » (voir image).
Le Dr Jean-Denis Rouillon, médecin au CHU de Besançon s’intéresse aux effets de l’absence de soutien-gorge sur le corps, il a mené une étude auprès de 330 femmes depuis 1997 âgées de 18 à 35 ans. D’après l’observation de ce groupe restreint, sans cet accessoire,“le mamelon remonte en moyenne de 7 millimètres en un an par rapport à l’épaule”. Le médecin a également relevé que, globalement, “les seins se raffermissent et que les vergetures s’estompent”.
Selon lui, le fait de soutenir les seins par un sous-vêtement dès lors qu’ils se mettent à pousser entraînerait, sur le long terme, la distension des tissus suspenseurs, voire leur dégradation. Un peu comme un élastique devenant peu à peu inopérant. Ainsi, les femmes se créent cette dépendance, alors qu’en laissant faire la nature, elles n’auraient peut-être jamais eu besoin d’en porter.
Article Futurasciences
Vous l’aurez compris, si votre corps a été habitué au soutien-gorge depuis 30 ou 40 ans, lorsque vous serez sans, vous ressentirez de l’inconfort et probablement une descente de vos seins car vous avez endommagé vos tissus. C’est le problème de la dépendance au soutien-gorge et ce pourquoi, il faudrait, dès la puberté, apprendre à laisser la nature faire son travail, en limitant le port du soutien-gorge.
Et c’est aussi pour cette raison, que les bienfaits sont à nuancer. L’étude ayant été faite sur des femmes jeunes, et probablement pas encore dépendantes à l’objet, c’est certainement pour cela que les résultats sont aussi spectaculaires.
Les autres bienfaits du non port de soutien-gorge
Jean-Denis Rouillon rapporte par ailleurs que les participantes à cette étude “ont constaté une amélioration en termes de respiration et de confort, la plupart ne supportent plus le soutien-gorge”. On peut noter en effet différents points positifs :
L’amélioration de la circulation sanguine et lymphatique
En comprimant la peau, le soutien-gorge empêche la bonne circulation de la lymphe, un liquide présent dans le corps dont la fonction est d’évacuer les toxines et les déchets. Les baleines et la pression exercée peuvent être à l’origine de rougeurs, d’irritations de la peau, ou même de kystes.
Certains auteurs sont d’ailleurs persuadés que la mauvaise circulation lymphatique, ainsi que l’augmentation de la température du sein, conduirait à terme à un risque du cancer du sein plus élevé.
L’étude de Sydney Singer et de son épouse Soma Grismaijer a porté sur 4 730 femmes dont 2 056 étaient en traitement pour un carcinome du sein. Elle suggère que celles qui portent leur soutien-gorge 12 heures par jour voient leur risque de développer un cancer du sein augmenter considérablement, alors qu’à l’inverse, les femmes qui n’en portent pas ou de façon sporadique sont très peu exposées. Par ailleurs, 18% des femmes touchées portaient un soutien-gorge la nuit, contre 3% parmi celles qui s’abstiennent.
Article d’Alternative Santé
Les études divergent à ce sujet donc prudence encore sur cet argument. L’étude peut potentiellement être biaisée car d’autres facteurs influent sur le cancer du sein (alimentation, traitements hormonaux, activité physique…).
Troubles posturaux, douleurs du dos, gênes à la respiration
Les bretelles du soutien-gorge exercent une pression sur nos trapèzes, et avec le poids de notre poitrine, cela peut conduire à rentrer les épaules vers l’avant et à adopter une mauvaise posture.
Des douleurs du dos peuvent également apparaître, surtout avec un soutien-gorge non adapté.
Quant à la respiration, beaucoup de témoignages vont dans le sens d’un meilleur bien-être et confort. Sans soutien-gorge, on peut respirer sans entrave.
Comment on fait pour s’en passer ?
Si vous avez eu l’habitude de porter des soutien-gorges pendant longtemps, le premier conseil serait d’y aller en douceur. Limitez les soutien-gorges à armatures et passez à des soutien-gorges “doux”, ou brassières, qui compriment peu votre poitrine. Passez vous du soutien gorge dès que vous le pouvez, en rentrant chez vous, le week-end. Et enfin, testez un ou deux jours sans et voyez comment vous vous sentez.
Beaucoup de témoignages s’accordent à dire qu’il est plus facile de tenter l’expérience l’hiver si vous avez peur du regard des autres, car on ne voit pas vos seins sous des gros pulls.
Je précise aussi, que la pratique du sport peut se faire maintenue si elle est à intensité élevée, sous entendu si vous exercez de la pression sur votre poitrine (course, sauts…). Mais là aussi vous pouvez choisir des brassières souples, selon votre confort. A chacun son avis sur la question, certaines s’en passent aussi pour le sport.
Idée reçue : “Le No bra est réservé aux petites poitrines”
C’est certainement plus facile à vivre en ayant des petits seins, à vrai dire je ne suis pas la meilleure pour en parler, mais je sais que sur internet vous pouvez trouver beaucoup de témoignages de femmes à forte poitrine le vivant très bien.
Exemple #1 – Exemple #2
Mon expérience personnelle
J’ai eu une puberté tardive et depuis j’ai toujours eu une petite poitrine. Le port du soutien-gorge chez moi, n’a jamais été pour des raisons de confort, mais vraiment pour des raisons culturelles.
J’ai utilisé longtemps des push-up ou soutif à armatures pour donner l’illusion d’une poitrine plus importante, plus ronde, plus galbée. Je n’assumais pas ma petite poitrine (95B) en forme de poire, et mes tétons qui pointent au changement de température. Et pourtant je me suis toujours sentie mieux sans soutien-gorge, je n’en portais qu’en public, par “obligation”.
Et puis, il y a environ 4/5 ans, pour des raisons d’abord esthétiques là encore (marques de bronzage), j’ai voulu tenté le Topless, c’est à dire aller à la plage avec un bas de maillot uniquement. Ca a été une révélation, on se sent libre, confortable, on sèche vite, c’est tellement pratique ! Le regard des gens sur la plage en été, n’a pas été forcément difficile à gérer pour moi (à part les quelques vieux pervers que l’on trouve toujours..), puisque le contexte autorise un peu plus de légèreté en vacances, et que ce sont des personnes que l’on ne revoit pas donc… OSEF.
De cette expérience, je me suis dit “mais pourquoi je remet un soutien gorge en partant de la plage pour aller en ville?”. J’ai alors démarré le No bra l’été, en sortant de la plage en débardeur ou en petite robe. Les hautes températures de l’été, et le fait de transpirer beaucoup plus avec un soutien gorge m’ont aussi poussé vers le No bra.
En parallèle, j’ai vu une kiné qui m’avait recommandé de travailler ma posture car mes épaules ont tendance à rentrer vers l’avant, avec mon travail sur ordinateur. Çà a été le déclic pour se passer au maximum du soutien-gorge.
J’assumais alors totalement mes seins sans soutien gorge à l’extérieur le week-end MAIS le plus compliqué a été d’assumer au travail, devant des gens que l’on connaît, et que l’on voit tous les jours, et surtout parce que le non port de soutien-gorge a cette connotation de “ne pas faire professionnel” ou de distraire.
J’y suis passée, au fur et à mesure, mais j’avoue que j’ai du sacrifier une bonne partie de ma garde-robe. On oublie les petits débardeurs moulants blancs à travers lesquels on voit les tétons par transparence… Je pense essayer les cache tétons ou autre solution qui ne me comprimerait pas pour porter ce genre de hauts, sinon je les réserve au week-end.
En tout cas, la liberté et le confort offert par le No bra sont indéniables, et je n’ai pas envie de revenir en arrière ! J’ai une meilleure posture, j’ai une impression de mieux respirer. Impossible pour moi de remettre un soutien-gorge, je me sens trop oppressée. Pour les brassières de sport, je suis passée à des maintiens plus légers.
J’assume ma poitrine naturelle, bien qu’elle ne corresponde pas forcément aux standards de beauté, même quand ça pointe, ou quand j’ai un haut moulant qui me donne l’impression de ne pas avoir du tout de poitrine.
En savoir plus
Virginie découvre dans la presse féminine que le soutien-gorge pourrait être cause de cancer du sein et serait même néfaste au bon maintien de la poitrine… Perplexe, elle décide de mener l’enquête… Auprès de médecins, de spécialistes du sein, de professionnels de la lingerie mais également d’historienne, d’anthropologue, de féministes (de Claude Sarraute aux Femen en passant par les filles de la Slutwalk). Elle va également découvrir que ce petit bout de tissu est porteur de nombreuses contradictions…